Maïs rouge d'Astarac : un collectif engagé

Web-série : Maïs rouge d'Astarac

Une démarche citoyenne portée par le collectif Maïs Population

Il ne faut jamais sous-estimer l’engagement citoyen et le pouvoir du collectif. Ils peuvent être le fruit de belles aventures, à l’image de celle de la «  résurrection  » du maïs rouge d’Astarac, endémique du Gers. Cet héritage agricole est au coeur d’une action de réintroduction engagée par le collectif Maïs Population. Une démarche citoyenne de valorisation portée par des particuliers, des agriculteurs, des restaurateurs et l’association Les Bios du Gers.

Son grain est d’un rouge pourpre du plus bel effet, mais il peut tendre vers le jaune, l’orange, le violet ou encore présenter des épis panachés. Le maïs rouge d’Astarac a cette caractéristique de ne pas être génétiquement modifié ou issu de croisements. Il s’agit d’une variété ancienne, locale, hétérogène et reproductible, très riche en protéines, peu ou pas consommatrice d’eau, qui s’adapte à son terroir. C’est pour toutes ces qualités, mais aussi pour le lien social qu’il génère, qu’un collectif de citoyen s’est fédéré pour réintroduire ce maïs gersois en agriculture biologique.

«  Tout est parti en 2015 de la librairie de Sarrant, où nous échangions entre citoyens sur les questions de transmission et de mémoire pour un tourisme plus solidaire et participatif  », explique Patrick Bodart, membre fondateur du collectif Maïs Population. Catherine Mitjana, ancienne propriétaire de la librairie, se souvient de l’émulation qui animait les participants à ces réflexions : «  De quoi pourrait-on être fiers, qu’est ce qu’on pourrait transmettre qui fait partie de notre territoire et de nos valeurs ? Ce projet sur le maïs ancien est parti d’une volonté citoyenne, avec l’envie de créer un espace d’échange, en y associant des agriculteurs et des acteurs du tourisme, de la gastronomie et de la culture occitane  ».

Un maïs adapté au terroir

Petit à petit, le maïs rouge d’Astarac a commencé à réécrire son histoire contemporaine grâce à ces citoyens passionnés et à des agriculteurs engagés, qui n’ont pas hésité à se laisser tenter par l’expérience. À l’instar de Pascal Thomas, producteur de fois gras et céréalier à Mansempuy : «  Il y a quatre ans, j’ai accepté de faire un test de gavage avec mes canards pour le collectif. Depuis deux ans, je plante du maïs rouge que je cultive avec le haricot grimpant. Ce maïs est adapté à notre terroir et à notre climat, et en plus, il est original !  ».

L’expérimentation suit aujourd’hui son cours, portée par l’enthousiasme des membres du collectif. Ici et là des initiatives émergent. De la bière, du pain ou encore de la polenta et de la farine, issus de la production du maïs rouge, sont désormais commercialisés dans le Gers. La production est encore modeste, mais la volonté de structurer cette fillière est plus forte que jamais.

Le saviez-vous ?
Le maïs rouge d’Astarac a été importé par les Italiens venus immigrer dans le Gers au début des années 20. Autrefois cultivé pour l’alimentation humaine, il a peu à peu disparu au profit d’une culture plus intensive, tournée vers l’alimentation animale, avec un maïs hybride offrant un meilleur rendement. Le maïs population raconte cette histoire paysanne du Gers que le collectif souhaite aussi valoriser.

Le maïs vecteur de lien social

Au-delà de la réintroduction d’une variété de maïs ancienne d’origine locale, le collectif Maïs Population a créé autour de ce projet une véritable dynamique citoyenne et sociale. «  La valeur de ce maïs historique réside aussi dans l’échange et la culture  », précise Patrick Bodart, membre fondateur du collectif. Un maïs fédérateur à l’origine de nombreuses initiatives festives et conviviales avec des temps forts telles que les fêtes des semis, de la récolte ou encore de l’égrenage, organisées annuellement par le collectif. Expositions, ateliers de vannerie, de cuisine, conférences et de nombreuses autres animations viennent également rythmer l’actualité du collectif. Autant d’occasions de se réunir et d’offrir des espaces de partage qui renforcent le lien social et permettent de mieux faire connaître le maïs rouge d'Astarac auprès du grand public.

Structurer la filière avec les Bios du Gers

De nombreux acteurs ont choisi d’accompagner le collectif Maïs Population dans sa démarche de réintroduction du maïs Rouge d’Astarac. Parmi eux, l’association Les Bios du Gers s’implique activement pour la valorisation de cette variété locale de maïs biologique en fédérant les agriculteurs et en étudiant les différents débouchés qu’offre cette alternative écologique au maïs «  classique  ».

«  Nous accompagnons les agriculteurs qui ont semé le maïs rouge sur le volet agronomique et nous sommes aux côtés du collectif Maïs Population pour structurer une filière de production biologique et locale en trouvant des débouchés  », souligne Cécile Blangero, animatrice filières végétales aux Bios du Gers. Farine, maïs concassé, polenta … Le maïs rouge se décline sous différentes formes et il est déjà utilisé pour brasser de la bière, pour fabriquer du pain, cuisiner du maïsotto (cousin du risotto), etc. Des essais ont également été menés sur le gavage des canards au maïs rouge, sur la possibilité de nourrir des poules pondeuses ou sur ses débouchés dans l’isolation. «  L’objectif est de se diversifier, d’aider à la diffusion et de faire connaître le maïs rouge au grand public  ». Si les rendements ne sont pas les mêmes qu’une culture de maïs conventionnelle, cette production paysanne mise surtout sur sa valeur ajoutée identitaire. Certains restaurateurs du Gers ne s’y sont pas trompés et proposent déjà des recettes à base de maïs rouge d’Astarac à la carte. Le mouvement est en marche…